L’islamisme radical s’engouffre dans le vide laissé par la République
L’islamisme radical s’engouffre dans le vide laissé par la République.
L’assassinat de Samuel Paty, vendredi 16 octobre, est terrible. Il s’agit d’un geste inadmissible, inexcusable, injustifiable.
Ce professeur est mort d’avoir « fait son métier ». Sans doute le faisait-il consciencieusement, avec respect pour sa discipline et pour les enfants. Il méritait donc remerciements et peut-être même, félicitations.
Au lieu de récompenses, il a été décapité ! Mort pour avoir cherché à éveiller à la vie des enfants que notre République lui avait confiés…
Samuel Paty a été assassiné par un fanatique religieux. Un jeune homme de 18 ans, qui aurait pu être l’élève de Samuel… C’est aussi une tristesse infinie de constater qu’aujourd’hui, dans notre pays, sous notre République, un jeune de 18 ans puisse commettre de tels actes. Cet acte a été commis dans notre pays laïc, au nom d’une religion et d’un dieu !
L’Islam est-il une religion violente ?
Toutes les religions sont violentes. L’histoire de l’humanité est constellée d’épisodes guerriers, de massacres, de tueries commises par les membres d’une communauté religieuse sur une autre communauté religieuse. Ou à l’encontre d’une population à des fins de soumission et de colonisation. Depuis que la croyance en un ou des dieu-x existe, les humains ont utilisé cette croyance pour asservir leurs ennemis. Mais il ne faut pas oublier que la religion sert aussi à contrôler sa propre population. Une religion, c’est d’abord un ensemble de règles, de lois, soit disant d’origine divine, donc non-discutables, qui s’applique, volontairement ou non, à une population.
Et ce contrôle est souvent violent, moralement ou physiquement. Les femmes le savent bien, elles qui sont les premières victimes de cette oppression religieuse.
Toute les religions ont de telles pratiques, à un stade plus ou poins avancé selon la période historique.
Et l’islam n’échappe pas à la règle.
Cependant, il me semble que cette religion possède une spécificité: elle est la dernière des grandes religions monothéistes. C’est sans doute ce qui l’a contraint à s’imposer rapidement et par la force au cours des 7ème et 8ème siècles. Car c’est bien par la guerre que l’islam s’est très vite répandu en Arabie, au Moyen-Orient, Afrique du Nord puis au sud de l’Europe. Cette conquête militaire est une spécificité de l’islam. Notons toutefois que, à de rares exceptions, la pratique de l’islam n’a jamais été imposée violemment. Les populations des régions conquises étaient incitées (grâce à des avantages et des facilités) à devenir musulmanes.
Cette violence dans la conquête de territoires importants à néanmoins permis la création d’une civilisation ou les savants, les poètes, les philosophes ont brillé sur le monde entier.
Puis, cette civilisation, comme toutes celles qui l’ont précédé, a décliné. Ce fut ensuite le temps des colonisations et de l’exploitation des ressources et des populations. Le temps de l’humiliation pour ces héritiers d’une des plus grandes civilisations que l’humanité ait créé.
L’échec de la décolonisation
On ne dira jamais assez le mal qu’a fait la colonisation. Je veux dire, l’ensemble des différentes colonisations qui ont sévi à travers le monde.
Mal auquel il faut ajouter les erreurs qui ont été commises lors des décolonisations. Ce moment de l’histoire, et particulièrement de notre histoire, qui débute après la deuxième guerre mondiale, aurait pu marquer le début d’une véritable ère nouvelle. Mais il en a été autrement. Les puissances coloniales, la France en premier, ont voulu continuer à contrôler la vie des populations colonisées. Même après la proclamation des indépendances.
Les relations particulières de la France et des pays d’Afrique du nord et sud-sahéliens, ont fait que notre pays a pu s’enrichir de la présence de très nombreuses personnes issues de ces anciennes colonies. Certes, cette présence n’a pas toujours été complètement volontaire. Elle n’a jamais été heureuse, ni pour les accueillant, ni pour les arrivants (surtout pour les arrivants). Mais cette migration importante en nombre et en qualité, qui a permis une reconstruction de la France à moindre coût, a aussi produit un mélange de population auquel personne n’était préparé.
Les migrant-e-s sont venu-e-s avec leurs bagages, matériels et culturels. Leur religion aussi. L’islam est maintenant la deuxième religion de notre pays, en nombre de croyant-e-s. En nombre de pratiquant-e-s, cela reste à vérifier…
Ne pas avoir enseigné notre histoire, celle de la colonisation, puis celle de la décolonisation reste une faute majeure de notre pays.
C’est en partie ce prix que nous payons aujourd’hui…
Où est la République ?
Pourtant la République était bien armée pour résister à un tel mélange de population. Les valeurs de base de notre société avaient été l’objet de nombreux débats. Je pense bien sûr, en premier lieu, à la laïcité, il y a plus d’un siècle.
Mais je pense aussi à notre dialogue social, notre protection sociale, notre éducation nationale…
Tout cet ensemble d’institutions qui faisait système a commencé à s’écrouler à la fin des trente glorieuses. Une fois la reconstruction du pays achevée, lorsque les systèmes financiers ont vu qu’ils allaient, de nouveau, pouvoir faire fructifier leurs milliards, ils se sont attaqué aux socles de la République.
Les syndicats, d’abord, qu’il fallait détruire, même si pour les casser il fallait en construire d’autres…
Les services publics, ensuite. Après avoir été les fers de lance de la République au début du XXeme siècle, les fonctionnaires sont devenus des « coûts » qu’il fallait réduire. C’est ainsi que l’Éducation nationale a été décrédibilisée, puis entamée dans ses fonctions. C’est ainsi que le système de soins a été cassé, dans son ensemble, au profit de lieu de soins privés. C’est ainsi que la police est devenue de plus en plus répressive à mesure qu’on lui diminuait les moyens.
Aujourd’hui, des quartiers entiers, des campagnes entières sont dépourvus de services publics. Plus de médecins, plus d’école, plus de postes, plus de policiers…
De son côté, l’éducation populaire a longtemps été un autre pilier de l’action de notre société pour assurer sa cohésion et maîtriser ses valeurs.
Les associations, dites d’éducation populaire, qui pendant une centaine d’années ont porté ce projet, sont aujourd’hui moribondes. Les aides financières encore suffisantes dans les années 70, sont aujourd’hui rares. Elles sont liées à un projet précis, limité dans le temps. Elles ne permettent plus l’élaboration et la mise en œuvre d’un travail éducatif à long terme. Les associations qui survivent aujourd’hui sont celles qui ont su migrer vers des activités lucratives, oubliant ainsi leur mission originelle.
Ces espaces laissés vides ont permis à d’autres structures de s’engouffrer. Des associations caritatives ou cultuelles, des fondations, des écoles privées religieuses se sont installées dans ces espaces. Elles y accomplissent un travail efficace en terme d’aide au personnes nécessiteuses. Mais efficaces aussi au niveau de la propagation de leurs idées.
Comme s’étonner, dans ces conditions, que des drames comme celui que nous venons de vivre se produisent ?
Quels remèdes ?
Les solutions me semblent évidentes: il suffit que la République ré-occupe les espaces qu’elle a laissé vacants.
Ce qui sera évidement bien difficile. Il a fallu presque un siècle, deux guerres mondiales, de nombreux mouvements sociaux pour construire une société bâtie sur la solidarité, la laïcité. Ce n’est donc pas en 5 ou 10 ans que nous pourrons reconstruire ce qui a été cassé. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas commencer.
D’abord, il faut avoir comme objectif principal de recréer des services publics, dotés de missions claires et de moyens suffisants. Je pense bien évidement en ces temps très agités, d’abord à la santé, à l’éducation et à la police.
Il faut ensuite créer un tissu associatif local, doté lui aussi de moyens pérennes.
Il faudra ensuite re-créer de la vie, localement, c’est à dire une possibilité de vivre, travailler sur tout notre territoire.
Il faudra enfin que le dialogue social rénové permette aux personnes qui désirent travailler, de le faire dans de bonne conditions.
Tout cela se faisant dans un cadre respectueux des équilibres écologiques et environnementaux…
Du travail pour trois générations !!!