Confinement

Jour 33: Aline, la Petite Fille du Soleil qui chante des Mots Bleus aux Marionnettes

Vendredi 17 avril. Les articles s’enchaînent sur ce blog, et les annonces de décès s’accumulent.
Le danger serait de transformer ce qui se veut toujours comme le journal de mon confinement, en une rubrique nécrologique. Mais comment ne pas évoquer le trouble ressenti à l’annonce de certains décès. Christophe, bien sûr ! Oh pas pour l’homme que je ne connais pas et qui ne semble pas toujours avoir eu un comportement humainement exemplaire. Mais pour l’évocation de mes jeunes années. Parce que Christophe, pour moi, c’est les années 60. C’est le rappel de mes premières révoltes, contre le système scolaire, contre les parents, contre ces chanteurs symbole d’un ancien monde. Ce qui n’empêchera pas l’abrutissement des esprits avec ces bluettes gnangnan à l’heure où nous nous apprêtions à changer le monde ! Certain-e-s de ces yéyés sont toujours là, soixante ans après. Ils nous rappellent que nous avons grandi avec eux, que nous avons mûri avec eux, que nous vieillissons avec eux. On finit par les aimer, sans doute parce qu’ils nous rappellent notre jeunesse. Ou comme chantait Jean Ferrat « Depuis le temps que nous entendons pire!« 
Mais le départ de ces « gens célèbres » ne nous fait pas oublier que des gens proches s’en vont aussi. La présence de la maladie devient plus palpable depuis que je connais certaines personnes touchées. Voire, coulées !
Aujourd’hui je ne pleure pas Christophe. Je pleure une nouvelle partie de ma jeunesse qui s’en est allée.

Ma tension est toujours dans le jaune. Mais c’est du jaune foncé… Je pense de plus en plus que ces nouveaux médicaments ne sont pas efficaces.
Sinon, ce fut une journée sans sortie. Il faut dire que j’ai beaucoup travaillé, pour la CPNEF d’abord (élaboration de contenus de formations). Puis, l’après-midi,comme tous les vendredis, il y avait la réunion du Groupe de Travail sur le fonctionnement de l’Union Européenne. Nous avons bien avancé sur le décryptage des réunions des ministres des finances de l’Eurozone (7 au 9 avril), validée par la réunion du conseil de l’UE dans sa formation « finance » (du 16 avril) afin de préparer la réunion du conseil du 23 avril. S’il est plutôt facile de trouver tous les textes (convocation, ordre du jour, compte-rendu), il est plus ardu de lire entre les lignes. D’autant plus que le plus important est souvent ce qui n’est pas écrit…

Nous avons fini la journée avec Brassens. Je ne suis pas convaincu par l’intérêt et la qualité du documentaire de France3 (images cent fois vues, choix de narration chronologique, extraits de chansons, etc.).
Mais passer presque deux heures avec Brassens reste un ravissement pour moi. Il n’était pas question de manquer ce moment, même si j’ai aussi enregistré l’émission.
Georges Brassens est une autre partie de ma jeunesse. Un peu plus tardive. Je l’ai vraiment découvert à l’armée, avec mon ami Alain (dit la Lune). Autant mes années collèges ont été marquées par les yéyés (c’était une sorte de révolte contre les parents à l’époque que d’écouter Claude François, Johnny Halliday, etc.), autant les années lycée ont été marquées par la pop et les groupes anglais ou américains (Ten years after, Led Zeppelin, Deep Purple, les Stones, etc.), autant les années de fac ont été marquées par « les chanteurs à texte » (Brel, Ferré et Brassens). En 1972, lorsque j’étais à l’armée, est sorti le disque 13 de Brassens: Fernande, La Ballade des gens qui sont nés quelque part, La Princesse et le Croque-notes, le roi, etc.
Cet attrait pour ce poète-musicien ne m’a plus jamais quitté. A cette époque, je n’avais pas les moyens d’acheter tous les disques (vinyle) qui me plaisaient. J’étais inscrit à la bibliothèque de Nanterre, la seule qui faisait aussi discothèque à l’époque. Mon premier salaire après un mois de travail d’été, je l’ai utilisé pour acheter un magnétophone à bande. Je crois que l’ai toujours ces bandes (dans quel état ?). Je passais à la discothèque, je prenais quelques 33 tours, je les enregistrais. J’ai rapidement eu une collection importante. Tout Brassens, bien sûr ! Mais aussi Léo Ferré, et Léonard Cohen… Combien d’heures de révision avec cette poésie pour m’accompagner…
Et puis j’ai acheté une guitare (classique, puis une folk quelques années plus tard). Ce qui m’a permis de massacrer les chansons de Brassens, comme la plupart des copains de l’époque !
A la fac, avec Jean-Jacques, nous avions un jeu. A n’importe quel moment de la journée, l’un d’entre nous pouvait réciter un vers de Brassens. L’autre devait enchaîner par le (ou les) vers suivant et donner le titre de la chanson ! Ce n’était pas toujours facile pour moi, parce que j’avais l’habitude lorsque je chantais à la guitare et que j’oubliais des mots, de les remplacer par d’autres de mon invention. J’avais parfois des chansons avec des mots « corrigés » de Brassens !
J’ai toujours ces guitares. Je ne les utilise plus depuis très longtemps. Mon prof de musique préféré (Jean-Claude) m’a dit qu’elles étaient irréparables. Trop dég !

Pendant ce temps, un de mes frères écoutait Jimmy Hendrix, Tangerine Dream, Klaus Nomi.
Et mon frère le plus jeune écoutait Sheila. Qu’il écoute toujours d’ailleurs !!!

C’est terrible les inégalités culturelles au sein d’une même famille.

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